Amel Brahim-Djelloul
Souvenirs d'Al Andalus
Musique méditerranéenne traditionnelle
De Cordoue à Tolède, de Séville à Valence, de l’an 700 à 1492, Al Andalus fut le centre du monde civilisé et raffiné. Sur tous les plans, médecine, astronomie, philosophie, et bien entendu poésie et musique. C’est dans cet âge d’or et le regret d’avoir dû le quitter que la soprano Amel Brahim-Jeloul puise son énergie.
Amel Brahim Djelloul est arrivée en France à la fin des années 90, il n’ y avait sans doute aucune autre issue pour fuir la « décennie noire » du terrorisme islamiste algérien et pour assouvir sa passion du baroque et du chant lyrique. On dirait qu’elle était née Susanna (des Noces de Figaro) ou Despina (Così fan tutte) ou Pamina (La Flûte enchantée), tant elle maîtrise l’art de se fondre dans ses personnages et leurs costumes avec suavité, talent et une sorte d’espièglerie enfantine et joyeuse.
Est-ce la nostalgie du temps de la « Convivencia », période faste entre le VIIIe et le XIIe en Andalousie où toutes les communautés se confondaient dans un art de vivre, d’aimer et de penser, au-delà de toute confession ? Les arabo-musulmans et les juifs d’Andalousie commencèrent à être chassés à partir du XIIe siècle, une partie s’exilant au Maghreb, une autre vers l’Orient ottoman (Turquie et Grèce). Est-ce la blessure de la séparation ? Sa résonance encore puissante qui la pousse avec son frère aîné Rachid, brillant musicologue et violoniste virtuose à rendre toute leur vitalité à ces musiques arabo-andalouses de l’âge d’or, métissées, polies par les siècles. Afro-berbères du Maghreb, judéo-espagnoles de tout le bassin méditerranéen, turques, grecques, toutes ont en commun la poésie… Ils créent l’ensemble Amedyez (un mot kabyle). L’orchestre traditionnel (oud, kanun, violon, percussions…) autour de la chanteuse s’envole de modes en modes, de taksims en taksims vers les maalouf, les nouba, le chaabi et tout ce répertoire patrimonial et vivant, musiques voyageuses, rythmées, étroitement liées à la danse, héritières de Ziryâb, le merle noir andalou. En costume traditionnel, Amel Brahim Djelloul ressemble à une de ces reines anciennes, empreintes de dignité, rayonnant à la manière des déesses antiques. On sait aujourd’hui que les peuples berbères descendent en droite ligne des premiers Égyptiens…